En fervent soutien de Strië depuis ses débuts, je ne pouvais pas omettre d’écouter son troisième essai, qui est sorti une nouvelle fois chez la maison britannique Serein. La musicienne a d’ailleurs choisi l’occasion de la parution de ce noucveau disque pour révéler sa véritable identité, elle, qui se cachait déjà derrière l’avatar Iden Reinhart. Strië et Iden Reinhart ne sont nulle autre qu’Olga Wojciechowska. Et ouais.
Même si bah, personnellement, ça me renvoie à un anonymat identique à ses pseudonymes précédents. Sous son nom de baptème, la multi-instrumentiste polonaise a certes connu un regain de notoriété en remixant du Nathan Fake, et en signant un album sur Time Released Sound, autre label britannique tout aussi indépendant et confidentiel que celui qui accueille le projet Strië. Bref, tout ça pour dire que si on a déjà vu des pontes signer des disques sous couvert de pseudonymes cryptiques pour s’offrir une sortie de route et prétendre à l’anonymat, il est plus rare et surtout plus amusant de constater que certains artistes confidentiels les multiplient. En ces temps de crises identitaires et egotiques généralisées, on accueillera donc cette nouvelle avec l’émulation relative qu’elle mérite, et en présageant que l’artiste a ses raisons que notre raison ignore.
Perpetual Journey est librement inspiré de l’histoire de Laïka, cette chienne tristement connue pour avoir été envoyée dans l’espace par l’union soviétique au beau milieu des années 50. Aymeric Caron et ses ami.e.s(x.y) vegan nazis ne sont pas encore intervenus pour boycotter le disque et s’insurger contre cette propagande spéciste glorifiant la souffrance animale. Profitons en donc, tant qu’il est encore temps, pour célébrer ce très bon disque malgré sa très/trop courte durée, puisqu’il fait encore franchir un palier d’épure et de qualité à la musicienne polonaise.
Outre sa capacité à transmettre une variation ambigue des sentiments de flottements, cette nouvelle galette parvient à réaliser une synthèse fusion quasi parfaite des sillons expérimentaux dejà empruntés dans le passé par Strië. En matière d’ambient cinématique lacéré de violons (qui reste son instrument de prédilection), la musicienne a depuis longtemps démontré qu’elle n’avait plus rien à prouver. Elle semble sublimer par contre ici une démarche qu’elle avait déjà ébauché sur Struktura, en se révélant en orfèvre de la musique concrète et du laptop. En mettant les sous-titres, ça veut surtout dire qu’elle est parvenue à produire une musique sans beat mais qui respire en permanence, grâce à de subtils éléments pulsatils plus ou moins fatômatiques, qui participent donc à l’immersion et renforcent le caractère mystérieux de la musique. En plus d’être des titres extrêmement bien construits, Capsule et Test for Ability illustreront parfaitement mon propos.
Pour clôturer ce qui est sans contestation possible son ouvrage le plus conceptuel, Strïe pose deux titres où son érudition s’aère dans des collages faussement simples pour uen fois encore sévir dans la beauté pure. To Never Return Home et Perpetual Journey sont juste magnifiques, comme autant d’invitations aux voyages dont on fait le choix de ne pas revenir. Aussi funestes soient les destinations finales, puisqu’il vaut parfois mieux mourir que de disparaître.
Même si on pourra une nouvelle fois lui reprocher sa bien trop courte durée, Perpetual Journey est une nouvelle démonstration venue de Strië, qui, quels que soient ses noms d’emprunts, demeure une artiste viscéralement passionnante.
Trop court oui.. mais quel finish!
et je découvre son Maps and Mazes c’est comptueux